Le Président et le duo de journalistes
Au lendemain du face à face télévisé entre le président de la République française Emmanuel Macron, d’un côté, et les journalistes Jean-Jacques Bourdin (RMC) et Edwy Plénel (Médiapart), de l’autre côté, la planète internet n’en finit plus de se déchaîner via les commentateurs officiels, les professionnels de la profession, les éditorialistes, les humoristes qui s’en donnent à cœur joie, les annonceurs, les tweets et gazouillis des anonymes… Bref, ça balance pas mal aussi sur les réseaux sociaux.
Les uns décrivent une émission comparable à « Faites entrer l’accusé », les autres penchent plutôt pour une tendance plus électrique et arrogante façon « On n’est pas encore couché », ou « Salut les Terriens », d’autres encore évoquent « plus sérieusement » un « Muppet Show » revisité… La toile s’agite, se divise… La certitude, c’est que ce rendez-vous dominical ne semble avoir laissé personne indifférent, en tout cas du côté des téléspectateurs. C’est d’ailleurs souvent plus la forme que le fond – y’en a-t-il eu vraiment ce soir-là ? – qui est attaquée, et c’est vraisemblablement là le fond du problème. Les scoops ne sont pas venus ! Et lorsque Edwy Plénel interpelle le Président Macron avec son « Vous n’êtes pas le professeur et nous ne sommes pas les élèves », on croit revivre un remake usé d’un certain débat de la présidentielle de 1988, c’était le 28 avril, entre les candidats Jacques Chirac et François Mitterrand : « Ce soir, je ne suis pas le Premier ministre et vous n’êtes pas le Président de la République, nous sommes deux candidats… Vous me permettrez donc de vous appeler Monsieur Mitterrand ». Réponse cinglante de François Mitterrand à Jacques Chirac : « Mais vous avez tout à fait raison Monsieur le Premier ministre ! ».
Dans les rédactions, les medias, à n’en pas douter l’émission fera date et référence. Les interviewers ont cassé les codes des traditionnels entretiens télévisés « à la française », ils ont rompu la glace des non-dits, ou plutôt en élevant le ton (mais pas le débat) ont-ils pensé le faire. Une émission de ce genre médiatique, où l’on annonce en direct les résultats du match de football PSG-Monaco plutôt que des mesures, plutôt que des réponses, alors que le climat social dans le pays est en pleine ébullition, laisse perplexe, songeur.
Que faut-il retenir d’une telle rencontre ? Que la chaîne de télévision BFMTv a réalisé hier soir sa meilleure audience historique, avec 3,8 millions de téléspectateurs… et que deux journalistes ont enterré la fonction présidentielle en « live » ?